==Commentaires sur Contes et Légendes du Moyen-Âge français== \\ \\ * //Observations sur la genèse de l'ouvrage :// Ce titre, annoncé dès 1913 dans le programme de publications paru dans le tout premier volume de la collection, **//[[Contes populaires russes]]//**, mettra treize ans à sortir des presses. Le titre initial en était : **//Contes et Fabliaux du Moyen-Âge//**. \\ \\ En 1913, précisément, est réédité un ouvrage de 1908, **//Fabliaux et contes du Moyen-Âge//**, chez l'éditeur Henri Laurens, et dont l'introduction est signée **Louis Tarsot**, qui était, en 1908, excusez du peu, "Chef de Bureau du Ministère de l'Instruction publique". La couverture mentionne : "Édition pour la jeunesse". La disparition du mot **//"Fabliaux"//** dans le titre chez Nathan pourrait donc provenir d'une volonté de se démarquer de cet ouvrage. \\ \\ Toujours est-il qu'un peu plus tard au cours de cette même année 1913, lors de la publication du deuxième volume de la collection, **//[[Légendes et Contes d'Alsace]]//**, le projet de recueil a changé de titre et est devenu : **//Légendes et Tableaux du Moyen-Âge//**. \\ \\ Un coup d’œil au sommaire nous permet de voir qu'en fait de fabliaux, le recueil définitif n'en compte que 4, sur 13 contes et récits. Il se peut que le projet initial en incluait davantage. Si tel fut le cas, il y a donc eu modification de l'idée de départ, soit par simple choix délibéré après réflexion, soit pour se distinguer davantage encore du recueil de chez Laurens : en effet, ce dernier contenait déjà de nombreux fabliaux, dont deux repris ici par **Marcelle & Georges Huisman** : //"La housse partie"// et //"Les trois aveugles de Compiègne"//. Un troisième texte commun aux deux recueils vient s'ajouter à cette liste potentiellement litigieuse : la fable //"Aucassin et Nicolette"//. \\ \\ Il existe différentes façons d'entendre le terme choisi : **//"Tableaux"//**. Ce peut être une manière allusive de désigner : soit des textes médiévaux qui ont su dépeindre et "croquer" la vie moyenâgeuse avec pertinence, soit des récits "d'alors" narrant un évènement historique, soit encore des œuvres médiévales devenues emblématiques de cette époque (et qui sont devenues, littéralement, le sujet d'inspiration de nombre de peintres pour leurs tableaux). Dans cette catégorie, **//"Tableaux"//**, peut-être y pouvons-nous classer des pièces comme //"La légende de Guillaume d'Orange"//, //"La chanson de Roland"// ou bien encore //"Le Roman de Renart"//.\\ Cet élargissement du sommaire à ces **//"Tableaux"//**, au détriment possible et même probable des **//"Fabliaux"//**, aurait engendré ce nouvel intitulé. \\ \\ Quant à la permutation **//"Contes"//** <-> **//"Légendes"//** : \\ \\ - un **//"conte"//** est un récit plutôt bref, faisant intervenir des éléments fabuleux au sein d'une histoire dont les péripéties vécues par un héros imaginaire dans un lieu imaginaire résonnent comme une leçon de morale, une leçon de vie ;\\ - une **//"légende"//** est un texte qui peut être beaucoup plus long et développé, et qui donne soit une explication fabuleuse à une formation géologique existante, soit une genèse imaginaire à un fait historique authentique, soit le récit d'exploits surhumains ou d'actions "sur-héroïques" ou de faits miraculeux attribués à des personnages ayant réellement existé, soit encore une histoire fantastique pour raconter la naissance ou l'évolution d'une ville ou d'un pays. \\ \\ Les **//"Contes"//** sont ainsi plus proches des **//"Fabliaux"//** tandis que les chansons de geste, qui occupent plus de 100 pages dans le recueil définitif, se rapprochent davantage de ce qu'on définit comme des **//"Légendes"//**. \\ \\ Les termes **//"Contes"//** et **//"Légendes"//** étant en train de devenir, en 1926, le dénominateur commun à la plupart des ouvrages de cette collection chez Nathan, le titre finalement retenu, **//Contes et Légendes du Moyen-Âge français//**, paraît, somme toute, logique. \\ \\ Quant à la précision "patriotique" qui suit le titre définitif, est-ce, là encore, une précaution de l'éditeur afin de s'assurer du distinguo par rapport à d'autres ouvrages parus ou à paraître sur le même thème ? \\ \\ Pour exemple, l'année 1914 a vu paraître un ouvrage de **Walter Böhme** intitulé, tout comme l'ouvrage paru l'année précédente chez Henri Laurens (celui préfacé par **Louis Tarsot**) : **//Fabliaux et contes du Moyen-Âge//**. Si les titres sont exactement les mêmes, leur contenu respectif est pourtant bien différent, le recueil de 1913 proposant une illustration littéraire du Moyen-Âge en France, le second, des textes de la même époque mais pas spécifiquement de plume française.\\ La possible crainte d'un incident similaire a peut-être incité Nathan à prendre les devants, afin d'éviter ultérieurement toute confusion de ce genre, et à préciser **//"Moyen-Âge __français__"//**. \\ \\ Ce faisant, comme une seule flèche qui atteindrait deux cibles, l'éditeur rassure du même coup le lecteur assidu des autres volumes de la collection : car des récits médiévaux sont déjà présents dans les ouvrages précédents, comme la britanno-bretonne (celtique, quoi !) légende arthurienne, les anglo-saxonnes aventures de Robin des Bois, la germanique légende des Nibelungen ou encore les aventures du bas-saxon Till l'Espiègle, ainsi que des extraits de l'espagnol Romancero. La précision **//“Moyen-Âge __français__”//** sur la couverture du recueil permet de lever les inquiétudes de redites ou de doublons sans même avoir besoin d'ouvrir le livre pour consulter le sommaire. \\ \\ Enfin, sur les cinq ouvrages que **Georges Huisman** a publiés, sa femme **Marcelle Huisman** a collaboré à l'écriture de deux d'entre eux, précisément les deux recueils de contes réalisés pour Nathan. Il faut dire qu'à l'époque de la rédaction du premier recueil, consacré au Moyen-Âge, **Georges Huisman** avait une vie politique et professionnelle très dense. Sa femme Marcelle a donc probablement eu deux fonctions : celle d'une indispensable collaboratrice, mais peut-être également celle, en tant que femme et mère de famille, qui a possiblement permis à Georges (qui avait jusqu'ici rédigé des ouvrages didactiques sur l'art), de revoir sa copie pour ce premier recueil afin de l'ajuster à la nouvelle politique engagée par Nathan pour cette collection : se recentrer sur le jeune public.\\ Ces quelques points de détails et cette dernière hypothèse tendraient à expliquer pourquoi la gestation de ce recueil a été si longue (13 ans entre sa première annonce et sa publication). \\ \\ * //Remarques sur le contenu :// Tout comme pour //"La légende de Guillaume d'Orange"//, les textes composant la partie intitulée **"Le Roman de Renart"** ne sont pas, à proprement parler, des contes indépendants les uns des autres, mais plutôt les chapitres d'un seul et même ensemble narratif. \\ \\ * //Au fil des édtions :// La précision **//"français"//** derrière **//"Moyen-Âge"//** disparaîtra en 1962.